Titre: L'Aigle de la Neuvième Légion
Série: Les Trois Légions
Auteur: Rosemary Sutcliff
Edition: Gallimard Jeunesse
Marcus Flavius Aquila, jeune centurion ambitieux, est envoyé au-delà des mers pour faire régner la paix romaine en Bretagne. Très vite, il obtient la charge d'une mission secrète et périlleuse : retrouver l'aigle de la 9e légion, l'étendard que portait son père avant de mystérieusement disparaître avec ses hommes. Sous l'apparence d'un oculiste ambulant, Marcus part sur les traces de la 9e légion et s'enfonce en territoire barbare...
Avis de Lili:
Si je vous dis: "Centurion de Neil Marshall sorti en 2010" ou "l'Aigle de la Neuvième Légion de Kevin Macdonald en 2011", vous me dites: péplum au cinéma .... Mais aussi: adaptation du tome 1 de la trilogie de Rosemary Sutcliff. Deux films d'actions dont le premier se démarque totalement du livre ( les noms des personnages ont été changé et le héros vient de cette 9ème Légion) alors que le second prend sur lui de rentrer dans la relation Romain / Breton en temps de guerre.
Bref!
Je vais vous parler du second film en même temps que du film, par moments. Je ne pourrai pas faire autrement vu ce que cette lecture a laissé derrière elle.
Avant de lire, j'avais pris mes marques, je savais donc que ce livre s'adressait à des 9 à 15 ans et avait été publier en 1954.
Pourquoi je précise?
Premièrement, le style d'écriture s'adresse, sans discussion, pour des enfants, voir des adolescents. Il n'est pas déplaisant pour un lectorat adulte, si ce dernier ne cherche qu'une bonne lecture qui passe et ne dure pas (je l'ai lu en 2h20, c'est dire et je n'ai pas le cerveau en ébullition).
Les actions des personnages sont décrites en survol, pour que le lecteur sache ce que le personnage fait exactement. Les pensés sont survolées, elles aussi: le strict minimum pour dire " il ressent ceci ou cela, quand même!".
Minimum syndical, un peu dérangeant pour moi.
Résultat: des enfants de neuf à quinze ans apprécieront cette lecture pour sa simplicité et son approche "allons dans le vif du sujet!"
Deuxièmement , ce livre est mou.... Les personnages sont mous... Les aventures sont molles... C'est ... Mou tout en étant rapide!
Trois lignes plus hauts, je vous le dis: l'approche "allons dans le vif du sujet", c'est l'expression clé pour décrire ce bouquin. Tout se passe très vite. Trop vite. Tout le monde, il est gentil, beau, magnifique... Bisounours existait au temps des romains.
Marcus se fait blesser en sauvant ses hommes, il est accueilli par son oncle, il sauve un esclave qui perd son combat (contrairement au film), il demande à son oncle de l'acheter pour lui ( contrairement au film), l'esclave arrive et jure de rester auprès de Marcus ( scène contraire au film). Et là, on a une dizaine de pages où Esca et Marcus s'entendent comme s'ils se connaissaient depuis des lustres. Pas de peur de voir l'esclave le tuer ou le trahir. Non! Marcus, il a confiance et laisse donc son esclave partir à la chasse et vaquer à diverses occupations.
C'est boooooo!
Le meilleur reste la rencontrer Cossia... Je m'attendais à une relation un peu houleuse, vu que la jeune fille (14 ans dans le roman) montre, d'entrée, un caractère bien trempé. Mal m'en a pris. J'avais oublié qu'en 54, les femmes restaient chez elles. Notre chère Cossia qui rêve de retourner sur sa terre natale loin des barbares romains se laisse traîner d'une ville à une autre par sa tante... Elle râle juste quand Marcus lui en laisse le loisir. Heureusement, pas souvent! Ouf!
Tout cela en cent cinquante pages. Des instants traînent en longueur pour dire: un peu de psychologie. Sans plus. Définitivement, ces moments n'apportent rien au lecteur.
Personnellement, je regrette ce survol des caractères et même des histoires personnelles. En fait, l'auteur est restée cantonner à : trouver l'Aigle perdu.
Je vous avais dit que je ne pourrai pas empêcher le parallèle entre la Neuvième Légion de Kevin Macdonald en 2011 et le livre. Si vous avez vu le film avant de lire le livre (la majorité des gens ont été dans ce cas), vous vous attendrez à autant de pression entre les personnages et dans la quête que celle vue à l'écran.
Le réalisateur nous emmène au travers des caractères, des ressentis, des deux protagonistes. On suit leurs évolutions personnelles (deux mondes différents qui se rencontrent et s'apprivoisent), mais on découvre aussi ce qui se cache derrière la quête de Marcus et d'Esca par extension. Dans le roman de Madame Sutcliff, on se contente de suivre Marcus et Esca déguisés en oculiste de l'époque (des charlatans en somme. Mais des bons charlatans vu qu'ils guérissent bon nombre de gens sur leur chemin). On ne sait pas trop pourquoi Marcus va à la recherche de l'Aigle... Surtout qu'il sait, dès le départ, que ça ne changera rien à sa condition. Ca n'a pas l'air de le déranger. En fait, Marcus est un bon romain et quand il apprend d'un sénateur venu visiter son oncle que l'Aigle rend les ennemis plus forts mentalement parlant, il décide d'aller le récupérer. Là où le film nous présente un fils torturé par l'idée que son père a entaché le nom de la famille, dans le livre sa décision ressemble à s'y méprendre à une lubie d'adolescent: "j'ai décidé, je fais et vous pouvez tenter de m'en empêcher, je hurlerai jusqu'à ce que vous craquiez!"
Quand à Esca, dans le film, il est là, colérique, attendant le moment pour agir, on le sent à fleur de peau, prêt à fondre sur sa proie dès qu'il le pourra. Dans le livre, il suit Marcus parce que ... il en avait envie. Parce qu'il n'a pas pensé à autre chose et qu'il a promit. Voilà! Voilà!
Esca est donc un esclave fort complaisant.
Et Marcus un bon Romain.
Pourtant certaines scènes, au début du roman, laissaient prévoir une chouette suite. Je pense, notamment, à la scène du bouclier et du fourreau. Esca explique à Marcus pour quoi les peuples du nord ne peuvent pas se contenter des biens faits amenés par l'envahisseur romain. Marcus se rend compte de sa jeunesse et de ses ignorances diverses. Ca dure le temps d'un paragraphe, puis on retourne à un Marcus qui attend quelque chose en constatant que sa jambe le fait souffrir et un Esca qui disparaît, on ne sait où ni pourquoi.
Même une fois en territoire ennemie, l'histoire reste plate. On avance, on attend quelque chose sans savoir exactement quoi, mais ça n'arrive jamais. Marcus et Esca rencontrent des tas de gens, ils sont sympathiques, et même quand ils font face à un ennemi qui les acculent près de la sortie, l'auteur parvient à rendre la confrontation superbement gentillette.
Finalement, Marcus et sa patte folle ( seule réelle blessure qu'il se fera dans toute son épopée) accompagnés de Esca reviendront en terres romaines sans trop de casses avec un oiseau sans ailes "qu'il fallait le ramener et c'est tout!" qui ne sert à rien pour Rome (sans aucune valeur sans les ailes), mais qui empêchera l'ennemi de se sentir tout puissant! Et le méchant aura quand même démontré son utilité en redonnant la bague du père de Marcus à ce dernier parce que "c'était un homme courageux et valeureux" (mort héroïquement alors l'ennemi lui a pris sa bague, of course!). Versons une larme pour ce geste héroïque.
J'ai dit que Marcus savait qu'il ne récolterait rien en allant chercher l'aigle? Madame Rosemary Sutcliff nous prouve avec la fin de ce tome 1 qu'en son temps, les lecteurs avaient besoin de voir la vie en rose: tout finit bien!
Esca devenu citoyen romain, Marcus possède ses terres et quelques sous ainsi qu'une enfant de 15 ans qui va devenir sa femme ....
Je vous ai spoiler le livre? ALLEZ VOIR LE FILM! >.<
Oui, normalement, c'est l'inverse, mais pas dans ce cas-ci! Croyez-moi! D'ailleurs, selon moi, je trouve que le film apporte plus de réponses au livre que l'inverse. Notamment sur les origines de Esca, comment il est arrivé dans l’arène et ce qu'il cherche réellement. Ce personnage reste très fantomatique dans le bouquin, apportant son aide quelques fois quand le héros ne peut pas s'occuper de certaines besognes.
Si vous aimez les romans historiques ( avec des erreurs), gentillet au possible et super facile à lire. Mignon sans plus, ce livre est pour vous ...
Pour les autres, qui s'attendent à de la baston, des sensations et des sentiments : le film vous dis-je!
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